Avant mon arrivée à Dakar dans quelques jours, j’ai participé à l’enregistrement de cette très belle émission qui nous ramène au Festival mondial des arts nègres d’avril 1966. Une époque où les grands artistes prenaient position. Miriam Makeba refusait l’invitation de Senghor car elle le trouvait trop conciliant avec le régime raciste sud-africain tandis que Duke Ellington profitait de l’invitation pour faire le seul voyage africain de sa vie.
L’intervention de Césaire marqua aussi la différence radicale entre une négritude de combat venue de la diaspora et une négritude de confort installée sur le continent, Senghor ayant eu dix ans plus tôt une phrase prophétique lors des débats de la loi-cadre anticipant la décolonisation par recolonisation : « il faut frapper l’imagination des Africains pour les détourner de la revendication pure et simple de l’indépendance. »
C’est cette phrase de Senghor qui explique en partie pourquoi Frantz Fanon ou Amilcar Cabral ont fait de la culture une arme politique au service de la désaliénation, mais une désaliénation qui ouvre l’esprit. C’est aussi en les incitant à miser sur le nationalisme culturel noir contre le marxisme noir que la CIA a favorisé une certaine vision romantique de l’Afrique dans les milieux afro-américains qui se heurtaient aux discours des révolutionnaires africains.
Les festivals sont là pour poser ce genre de questions, d’où mon soutien au FESTIVAL INTERNATIONAL PANAFRICAIN (FESTI’NGUÉKOKH). Don’t Agonize, Organize.